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La restauration à Québec : une industrie en pleine mutation

8 septembre 2014 |

La restauration à Québec : une industrie en pleine mutation

L’industrie de la restauration est évolutive, à l’image de sa cuisine qui nous amène dans des établissements misant sur l’atmosphère, les thématiques et les créneaux spécialisés plutôt que sur le service personnalisé. PRESTIGE a consulté plusieurs observateurs, chefs et restaurateurs qui en arrivent tous à la conclusion que cette industrie est en pleine mutation à Québec, délaissant la gastronomie au profit de la… bistronomie.



La clientèle en restauration varie énormément d’un établissement à l’autre et en fonction du type de cuisine offert aux clients. Si quelques restaurants traditionnels parviennent à tirer leur épingle du jeu, c’est souvent parce qu’ils appartiennent à de grandes chaînes. Le classique resto familial indépendant offrant des menus de base sans artifice est délaissé.






« Ce que l’on remarque dans l’industrie, c’est la spontanéité. On s’improvise restaurateur avec un concept, on ouvre un resto au coin de la rue, les blogueurs s’y mettent et tout le monde accourt. » -  Mme Suzanne Gagnon, copropriétaire du Laurie Raphaël.




Les données existent pour le prouver : seulement 76 % des restaurants survivent après leur première année d’existence, selon le portrait dressé par l’Association des restaurateurs du Québec, l’an dernier. Bravo, donc, aux pionniers de Québec qui sont encore en activité après 20 ans, car si l’on va plus loin dans les analyses, la même association de restaurateurs révèle que le taux de survie des restaurants après 8 ans n’est que de 17 %...





- Le prix des menus dans les restaurants québécois a augmenté de 2,2 % en 2013.


 - Depuis 2008, les restaurants à service rapide au Québec ont affiché une croissance moyenne de 4,8 % par an.


- La fréquentation des restaurants a diminué de 0,9 % en 2013, après une augmentation de 3 % en 2012.


- En 2012, la capitale nationale comptait 1991 permis de restauration.


« Ce que l’on remarque dans l’industrie, c’est la spontanéité. On s’improvise restaurateur avec un concept, on ouvre un resto au coin de la rue, les blogueurs s’y mettent et tout le monde accourt », observe Mme Suzanne Gagnon, copropriétaire du Laurie Raphaël, un restaurant présent dans le Vieux-Port de Québec depuis 23 ans.






« À Québec, la restauration devient brute contrairement à d’autres grandes villes du monde. Les gens adhèrent à des thématiques et à des coups de cœur. On ne goûte pas la restauration à Québec, on en fait l’essai. » - Robert Dion, éditeur du magazine HRI. - Photo : Isabel Cormier




Puisque la haute gastronomie de Québec suit ce marché, on comprend pourquoi le restaurateur Nicolas Cortina a modifié la vocation du réputé Michelangelo pour le scinder avec une pizzéria italienne. C’est sûrement la raison pour laquelle le Château Frontenac a aussi revampé entièrement son restaurant Champlain de grande classe et a revu sa formule pour la rendre plus accessible avec des concepts beaucoup plus tournés vers les bistros et les bars à tapas.



« À Québec, la restauration devient brute contrairement à d’autres grandes villes du monde. Les gens adhèrent à des thématiques et à des coups de cœur. On ne goûte pas la restauration à Québec, on en fait l’essai », mentionne le spécialiste Robert Dion, également éditeur du magazine national HRI (Hôtels, Restaurants & Institutions), ajoutant que la restauration haut de gamme de style « nappe blanche » est de moins en moins présente.



Une profession



Être restaurateur devrait être une profession au même titre qu’être chef cuisinier ou pâtissier, mais plutôt, c’est souvent une passion qu’entretient toute personne ayant une fibre entrepreneuriale moindrement développée. Cependant, ce genre de passion peut finir par coûter cher en fin de compte, prévient M. François Meunier, de l’Association des restaurateurs du Québec (ARQ). « Si les restaurants paraissent bondés le jeudi soir, il suffit d’aller faire un tour un lundi en avril pour constater que ce n’est pas toujours le cas », lance-t-il.  



La valeur totale de l’industrie de la restauration québécoise est estimée à 13,8 milliards de dollars pour 2014. Cela paraît énorme, mais ce n’est que 20 % de l’industrie totale de la restauration au Canada, compare M. Meunier.



La main-d’œuvre



L’autre volet à considérer avant de se lancer dans la restauration est la question de la main-d’œuvre. Entretenir une passion est une chose, mais la transmettre à ses employés en est une autre. Les travailleurs en restauration sont de plus en plus difficiles à recruter et, surtout, à conserver. La dernière réglementation gouvernementale qui limite l’embauche temporaire de main-d’œuvre étrangère a nui à environ 3 000 établissements québécois cet été, évalue M. Meunier.






« Il n’y a plus de bon resto de haute gastronomie qui ouvre à Québec maintenant. Lorsque la musique d’ambiance devient un facteur décisionnel pour une sortie, on fait d’autres choix. » - M. Antoine Xénopoulos, propriétaire du Louis-Hébert.




La fidélisation



Un autre défi à relever aujourd’hui en restauration est celui de la fidélisation de la clientèle, tentée de partout par la variété, le glamour, les happenings et les nouveautés, considère M. Antoine Xénopoulos, du restaurant Louis-Hébert, sur la Grande Allée. Depuis 34 ans, son établissement peut heureusement compter sur l’industrie touristique qui lui amène un bon nombre de clients. Mais pour la clientèle locale, il doit innover constamment et surpasser les attentes. « Il y encore de la demande pour la bonne gastronomie, mais il faut savoir y répondre et s’adapter », exprime M. Xénopoulos. Le Louis-Hébert a donc été réaménagé pour implanter des salons privés à l’étage de l’établissement. Le décor a été refait pour se tourner vers le contemporain, le menu est constamment revu pour y intégrer des plats plus légers et la carte des vins propose des découvertes. « Il n’y a plus de bon resto de haute gastronomie qui ouvre à Québec maintenant. Lorsque la musique d’ambiance devient un facteur décisionnel pour une sortie, on fait d’autres choix », exprime le restaurateur.



Taux de survie des restaurants :




  • Après une année d’existence : 76 %



  • Après huit ans : 17 %




Et selon M. Demetre Triantafyllou, propriétaire du Tuscanos, du côté de Sainte-Foy, la clé du succès réside aussi dans le contact direct avec la clientèle. Avec 40 ans d’expérience en restauration, il a compris depuis longtemps que sa présence régulière dans le resto permet de mieux comprendre les attentes. « En observant les clients, en discutant avec eux, c’est comme si tu les recevais à la maison. C'est un privilège de les avoir chez toi », compare-t-il.






 « La clé du succès réside aussi dans le contact direct avec la clientèle. » - M. Demetre Triantafyllou, propriétaire du Tuscanos.  



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